La Citoyenneté aujourd’hui

LA CITOYENNETE ENTRE ELANS ET CONTRADICTIONS

Yves Déloye, professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg, était mardi 21 mai 2002 l’invité de l’association "Citoyenneté et Démocratie Locale", pour une conférence-débat sur le thème de "la Citoyenneté aujourd’hui". Pour Michel Mathien, président de l’association, ce thème était une suite logique aux débats suscités par les deux tours de l’élection présidentielle et la volonté exprimée par une partie de la population, en particulier dans la jeunesse, de se « ré-approprier le politique ».

Comme l’a souligné Yves Déloye, spécialiste du sujet, le terme « citoyenneté », peu usité dans les années 1980, est devenu omniprésent, y compris dans le monde de l’entreprise. Pour lui, la citoyenneté présente trois dimensions : la « dimension civile » avec l’Etat de Droit (qui protège le « citoyen » contre l’Etat) qui a pris naissance au 18ème siècle ; la « dimension politique » avec l’Etat-Nation né au cours du 19ème siècle et, enfin, sa « dimension sociale » avec l’Etat-Providence datant du début du 20ème siècle. Une quatrième dimension peut s’y ajouter, la « dimension culturelle » et une cinquième, plus théorique, qui serait la « dimension écologique ». Pour, Yves Déloye, la trajectoire française se distingue de celle des autres pays par la valorisation de la dimension politique de la citoyenneté. Mais une telle position contient de nombreuses incertitudes. Jusqu’à l’élan provoqué par l’élection présidentielle de 2002, les « citoyens » marquaient de plus en plus leurs hésitations à participer aux élections (le poids croissant des abstentions) et à la vie politique ou à adhérer dans les partis politiques ou dans les syndicats. Ce phénomène, s’il devait se poursuivre serait un énorme danger pour la démocratie.

Yves Déloye a souligné que tous les indicateurs témoignent d’un recul de l’espace public et notamment de la responsabilité publique. Lors du débat, les questions ont porté sur la définition du terme « citoyen » qui reste ambivalent, la possibilité de la disparition de l’Etat-Nation qui est une question complexe car l’Etat est, de nos jours, beaucoup moins marqueur d’une identité même s’il se recompose tout en donnant l’impression de s’effacer. De même a-t-on relevé les difficultés pour l’Etat républicain de reconnaître en son sein une « spécificité culturelle » qui introduirait une discrimination positive, et celles touchant à la mise en œuvre de la « citoyenneté écologique » au regard des générations futures. On a également pointé les contradictions qui se sont récemment révélées entre l’élan « citoyen » ou « républicain » pour le second tour de la présidentielle et, pour ne citer que cet exemple, la revendication d’une loi d’amnistie pour les infractions au code la route…

Laetitia THOMAS